Les étiquettes

Sep 12, 2019 | Écologie | 11 commentaires

étiquettes, réflexion, écologie

C’est drôle ce concept d’étiquettes. On en trouve partout, pour tout et chacun à une idée sur l’étiquette de l’autre.

Il y a des tonnes d’étiquettes dans la vie en général mais prenons les exemples qui me parlent :

– être zéro déchet

– être végétarienne

– être féministe

– être minimaliste

– être écolo (sans aucun doute la meilleure celle-là)

– être optimiste

– être bienveillante

– …

Je suis souvent mise sous l’une, l’autre ou toutes ces étiquettes (et toi aussi sans doute). Et le principe d’une étiquette, c’est que soit tu y colles, soit tu dois y renoncer. L’étiquette est censée te définir, comme la couleur de tes yeux ou la taille de tes pieds. Elle ne supporte pas de concessions, de défauts, d’approximations.

Et le problème de l’étiquette, c’est qu’on ne sait jamais trop comment elle arrive. Parfois, tu te la colles toi-même « je suis féministe », parfois on fait un raccourci entre tes actions et une étiquette, « tu réduis tes déchets ? Tu es zéro déchet ». Mais bien souvent, l’étiquette arrive, sans qu’on y fasse attention et sans trop savoir comment.

Le problème de l’étiquette, ce n’est pas le fait qu’elle existe mais le fait qu’elle nous enferme.

Se dire féministe, écolo, zéro déchet, végétarienne…c’est une façon de s’affirmer et de faciliter les rapports sociaux. Au restaurant, dire que vous êtes végétarien(ne) permet d’afficher clairement que vous ne mangez pas d’animaux et qu’il faut vous proposer un plat en conséquence. C’est quand même plus simple que de dire « alors, j’aurais besoin de précision parce que l’impact écologique de l’élevage intensif compte beaucoup pour moi, je ne veux plus participer aux conditions d’élevage et d’abattage des animaux et puis, j’essaye de ne plus faire de spécisme….vous me proposez quoi ? »…!

Et ça vaut pour toutes les étiquettes. En général, c’est plus simple, plus rapide et même plus « engagé » qu’un long monologue. 

Mais les étiquettes nous emprisonnent. Non pas par leur simple existence mais parce qu’en réalité, chacun a sa définition et ses frontières de ce à quoi correspond une étiquette. Et en général, l’étiquette ne supporte pas d’approximations, d’exceptions, de demi-mesure. C’est du tout ou rien !

En creusant un peu, on se rend compte qu’une grande majorité des personnes confondent l’étiquette, l’image qu’ils en ont et les actions qui doivent en découler. Être féministe ne signifie rien d’autre que le fait de prôner l’égalité homme/femme dans tous les domaines de la vie. Mais être féministe s’exprime avec une grande variété d’actions, de pensées ou de mécanismes. Et surtout, être féministe ne préjuge en rien du comportement de la personne qui se revendique (ou non) sous cette étiquette. Autrement dit, tu peux être féministe et mettre du vernis à ongles.

Autre exemple, tu peux te ranger sous l’étiquette ZD parce que tu es attachée à produire moins de déchets et à trouver des solutions plus durables au quotidien. Mais l’étiquette ZD ne préjuge en rien de l’étendue de ton comportement au quotidien, de ton niveau de « gestion des déchets » ou encore de ton mode de vie. Autrement dit, tu peux avoir l’étiquette ZD et acheter un produit avec emballage.

On confond ainsi des combats, valeurs, principes que l’on souhaite mettre en avant, revendiquer, porter, exprimer, approfondir…avec un mode de vie prédéfini. Or, par définition, les modes de vie diffèrent et changent au cours même de la vie. Les étiquettes ne signifient pas un taux d’accomplissement de 100% puisqu’il serait impossible de savoir sur quoi baser ce 100%. Être 100% ZD, c’est quoi ? Être 100% écolo, féministe, etc. ?

Autre soucis, les étiquettes arrivent même sur nos « caractéristiques physiques ou psychologiques ». Alors certes, si tu as les yeux bleus, tu as les yeux bleus, toutes nos caractéristiques physiques difficilement modifiables sont rarement concernées. Mais il en va différemment de ce qui changeant : la nature des cheveux, le fait de se maquiller ou non, le style vestimentaire, etc. Exemple typique des méfaits des étiquettes : j’ai les cheveux bouclés et j’aime en parler, montrer comment les accepter, les coiffer…mais ça ne veut pas dire que je renie quelque chose si je les attache ou, pire, si je les lisse ! Vous n’imaginez même pas le nombre de messages de « déception » que je reçois sur instagram quand je parle avec les cheveux lisses. Sans le vouloir, on m’a collé l’étiquette « curly » et je ne devrais pas en sortir. Idem pour la case des étiquettes psychologiques : avoir l’étiquette « optimiste » t’empêche souvent le moindre coup de mou ; ou la case des étiquettes vestimentaires : avoir l’étiquette « casual » te collera à la peau si un jour tu mets une tenue chic…

Enfin, la plus complexe des étiquettes est celle de « l’écolo ». A mon sens, le terme est bien trop large pour être une seule étiquette mais, là encore, pour des raisons de facilité dans la vie courante, on se colle souvent soi-même cette étiquette, à partir du moment où notre impact écologique a une importance pour nous. Cependant, comme elle est trop, on colle rarement à la définition de notre/nos interlocuteur(s). Pour cocher toutes les cases de l’étiquette écolo, il faut se lever tôt : être ZD ; végétarien ; à la mobilité douce (sans voiture, sans avion) ; acheter bio, éthique, local ; avoir un job à impact positif…bref je pourrais continuer encore longtemps.

Les étiquettes, c’est pratique dans la vie de tous les jours et c’est même nécessaire pour porter plus fort ses valeurs, mais c’est une sacré prison qui nous fait culpabiliser, cacher certains comportements, se critiquer les uns les autres, abandonner certains principes… Il est impossible d’éviter les étiquettes, phénomène classique de l’être humain qui a besoin de tout ranger dans des cases. Mais on pourrait essayer de distinguer l’étiquette du comportement, ou plus justement, l’étiquette de la valeur d’un être humain.

Vous avez une étiquette vous ?

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11 Commentaires

  1. Justine - What What

    Hello Julie,
    J’adore cet article !
    C’est vrai qu’on a de plus en plus de commentaires, que ce soit sur internet ou dans la vraie vie pour nous « rappeler à l’ordre » comme si nous nous contredisions par le simple fait de ne pas être à 100% écolo/zéro déchet/féministe…
    Alors que comme tu le dis si bien, on ne peut pas être à 100%, déjà parce qu’on est que des humains, et parce que personne ne saurait dire ce qu’est un bon écolo ou une bonne féministe finalement.
    C’est vrai que ça facilite la vie en général d’avoir une ou plusieurs étiquettes. Pour ma part, ça ne me dérange pas d’être cataloguée « écolo » ou « féministe » parce que cela fait partie de moi, de mon quotidien, tout comme le fait d’être rédactrice web, d’être en couple, d’avoir une maladie, etc. Et je suis totalement d’accord par le fait d’inviter les autres à distinguer l’étiquette du comportement 😀
    Merci pour cet article très intéressant, je file le partager sans modération !
    Bises
    Justine

    Réponse
  2. Meugleu

    Merci pour cet article qui est très juste.
    Avec Instagram on a créé tellement d’attentes de la part du « public » envers les « influenceurs ». Les étiquettes de la vraie vie sont déjà parfois difficile à décoller alors j’imagine quand tout une communauté rajoute une couche de colle à chaque fois (je ne suis pas sure de la pertinence de cette métaphore a posteriori)

    Réponse
  3. Virginie

    Merci Julie pour cet article.
    Ces étiquettes nous font finalement parfois oublier que nous sommes tous égaux sur un point.
    Parfaitement imparfaits.

    Réponse
  4. DANIEL

    Je souhaite réagir à cette réflexion , chose que je ne fais jamais mais là … En fait si on y réfléchit bien c’est vous les blogueurs , youtubeurs , instagrameurs et j’en passe , qui vous mettez au devant de la scène et parlez de votre passion . Mais j’ai remarqué que celà dérape toujours et vous commencez à faire monter des polémiques ou parler un peu trop de votre vie privée qui ne nous intéresse absolument pas et c’est là qu’ apparaissent les  » étiquettes  » . Restons objectifs et non subjectifs . Chacun fait ce qu’ il veut en toute liberté mais à partir du moment où vous en discutez sur les réseaux il y aura forcément des retombées. Vous donnez l’impression qu’ on est votre meilleur ami alors on réagit :  » oh ben oui t’étais mieux les cheveux comme ci comme ça  » . Là c’est un exemple . N’oubliez pas que beaucoup  » d’abonnés  » sont des gens seuls qui ont besoin d’échanger , eh oui ça c’est humain et je trouve que vous en jouez . Les étiquettes , vous vous les collez vous mêmes en fait , peut-être sans suffisamment faire attention aux gens qui sont derrière leurs écrans .

    Réponse
  5. julie

    Je suis évidemment pas du tout d’accord avec vous ! D’une part, le « vous blogueurs » ne signifie rien, je ne suis pas blogueuse de métier et il y a tellement de personnes différentes dans ce milieu que la généralité est impossible. Ensuite, les étiquettes, c’est dans la vie courante qu’elles s’expriment. Je n’ai aucun soucis à assumer mes choix ou mes principes sur les réseaux. Mais on subit tous les étiquettes dans la vie, sur nos principes, notre physique, notre comportement… Les réseaux ne sont qu’un reflet de la vie en général. Et dans votre exemple des remarques entre amies…à aucun moment il n’est acceptable de donner son avis sur le physique d’une personne si cet avis n’est pas sollicité. Agir sur les réseaux, c’est comme si vous étiez dans la rue, vous ne donneriez pas d’avis sur les cheveux de quelqu’un dans la rue. Quand à la solitude des gens, déjà c’est encore une généralité, et ça ne donne le droit à personne de critiquer quelqu’un. Personnellement, je reste courtoise et tolérante avec tous mes « abonnés » et j’estime faire attention à tout le monde vu le temps que je prends pour échanger, répondre ou conseiller.

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  6. Sophie

    Merci Julie pour cet article qui encore une fois sonne très juste !

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  7. Julie

    Ahaha non la métaphore est parfaite !

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  8. Sabine

    Je suis habituellement une lectrice passive… Mais plus je lis tes publications ici ou sur instagram plus je me dis qu’elles trouvent un écho en moi, qu’elles ouvrent tout un pan de réflexion que je ne soupçonnais pas. Bref, merci pour ton travail si sérieux, éclairant et bienveillant.

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  9. julie

    Oh merci beaucoup pour ton commentaire alors !

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  10. Mardgarieagdad

    Les étiquettes mettent une pression énorme ! On est pointé du doigts au moindre « faux-pas » et oui, ça fait culpabiliser. Merci pour cet article qui traite en partie d’un sujet qui me travaille en ce moment (consommation de protéines animales). Merci pour tous ces articles et posts que tu publies et qui m’ont changée.

    Réponse

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