A priori tout le monde sait communiquer sur les réseaux non ? Enfin sauf mon mec qui n’a toujours pas compris comment faire une storie mais je ne désespère pas ! Les réseaux sociaux permettent de partager, d’échanger, d’inspirer…et évidemment de créer des interactions. On commente une storie, un post, un statut, on envoie une question ou un message privé. Bref, on COMMUNIQUE.
Et on oublie bien trop souvent que si la communication est facile sur les réseaux, elle passe aussi par l’écrit.
De l’oral à l’écrit
Il y a de nombreuses différences entre une communication orale et écrite :
- la communication orale est instantanée : elle appelle un échange immédiat, à l’instant T. L’écrit lui est soumis à la loi du temps : le message qui vous envoyez n’est pas forcément lu sur l’instant. Cela pose un réel problème sur les réseaux sociaux qui sont eux-même soumis à l’immédiateté : une storie est postée à 8h le matin et votre réponse écrite peut-être lu des heures ou des jours plus tard. Elle perd alors de l’intérêt et pourra aussi soulever des incompréhensions en raison du décalage temporel : plusieurs heures plus tard, la personne qui reçoit le message écrit n’est peut-être plus du tout dans le même état d’esprit.
- la communication orale repose essentiellement sur tout…sauf les mots : a priori les informations reçues passent en grande majorité par la gestuelle puis la voix. Finalement, à l’oral et en direct, l’essentiel est « comment on dit les choses », plus que « quels mots on utilisent ». A l’écrit, le rapport est totalement inversé : les mots comptent pour l’essentiel, auxquels s’ajoutent la typographie (majuscule ou minuscule), la ponctuation (les ??!!!) et éventuellement les smileys.
Pour résumer, on dit souvent qu’à l’écrit, il faut penser que la personne qui reçoit votre message est sourd et aveugle. Elle ne sera guidée ni par votre voix, ni par vos intonations, ni par votre gestuelle.
il est alors important de comprendre que le destinataire ne le lira pas un message avec votre intonation. La personne utilisera sa voix, sa gestuelle et son ton, en fonction de sa personnalité, de son humeur, de ses problèmes, etc. Il n’existe pas de message neutre à l’écrit !
Les erreurs fréquentes de l’écrit sur les réseaux
Comme on oublie bien souvent les différences entre oral et écrit, on fait tous pleins d’erreurs. La principale erreur est de transposer un message oral en version écrite : vouloir transmettre une intonation orale par l’écrit. C’est impossible, je vous le rappelle, votre interlocuteur est sourd et aveugle, il ne reçoit qu’une suite de mots. Et c’est lui qui y ajoutera l’intonation de son choix, qui peut être l’inverse de la votre.
- utiliser des majuscules n’importe comment : à l’écrit les majuscules se traduisent systématique par un « haussement de voix » voir de la colère ou de l’excitation. Ex : écrire « quelle quantité de beurre dans votre recette? » et « QUELLE QUANTITE DE BEURRE ? », c’est la même question. Mais quand le premier cas, le destinataire lira une simple demande de précision (dont la réponse est à 99% déjà inscrite dans le contenu, mais passons!), dans le second cas, il lira le message comme une engueulade, sous entendu « pourquoi vous n’avez pas indiqué la quantité de beurre, c’est inadmissible! ».
- multiplier les ponctuations : ajouter plusieurs ???? ou !!! à l’écrit équivaut à insister lourdement sur la phrase. Ex : écrire « vous pensez vraiment que c’est la seule solution ? » et « vous pensez vraiment que c’est la seule solution ????????? », c’est dans le deuxième cas faire preuve d’agression envers votre interlocuteur. En règle générale, le ? ajoute de l’agressivité et le ! de la surprise (qui peut se transformer rapidement en moquerie).
- oublier toute ponctuation : à l’inverse, oublier la ponctuation peut non seulement amener des incompréhensions dans votre message mais aussi lui donner une connotation plus strict. La ponctuation permet de respirer, de donner du sens et de caractériser votre message. La supprimer, c’est laisser la voie libre pour toute interprétation. Sans respiration, la phrase est lue d’un trait et devient rapidement agressive par exemple.
- écrire comme à l’oral : vous discutez semis de tomates avec quelqu’un et vous parlez de « repiquage ». Novice, il répond instantanément « repiquer » ? Nul besoin d’ajouter autre chose, vous êtes en face, son intonation est claire : il n’a pas compris le terme et vous demande une précision. Autre situation : vous faites une storie sur le repiquage de vos tomates et vous recevez un message d’un inconnu « repiquer??? »… Dans 99% des cas, cette absence de formulation, de phrase complète et de politesse sera prise pour une agression et un manque de respect. Alors que l’intention est la même ! C’est bien parce qu’on ne peut pas écrire comme on parle ! A l’écrit, il manque tout ce qui fait qu’à l’oral, on peut souvent se passer de verbes, de ponctuation, de politesse : l’échange réel, l’immédiateté, l’attitude, l’intonation.
- se penser en tête à tête : là ça vaut pour le cas particulier de ceux qui gèrent des réseaux sociaux mais beaucoup d’incompréhensions viennent aussi du fait que l’échange est déséquilibré. C’est l’exemple typique des fautes d’orthographe : vous répondez à une storie d’une blogueuse pour souligner une faute et vous ne comprenez pas que la personne le prenne mal. Sauf qu’elle a reçu 57 messages à la suite pour lui souligner cette même faute. En comparaison, c’est comme si vous discutiez dans un restaurant avec quelqu’un et qu’après avoir mal conjugué un verbe, l’intégralité du restaurant se retournait vers vous pour vous corriger, un par un, votre faute. Je vous mets au défi de ne pas avoir envie de hurler sur le 10ème….!
- vouloir y mettre une émotion ou une tonalité particulière : à l’écrit, c’est quasiment impossible, notamment sur les réseaux sociaux où l’on écrit très rapidement. La grande majorité des cas, on lit « oui mais j’avais répondu gentiment » ou « je dis ça sans vouloir te vexer », etc. Sauf que ça n’existe pas un message « dit » gentiment par écrit ! Impossible de « dire » d’une manière ou d’une autre une phrase écrite. Encore une fois, votre lecteur est sourd et aveugle, dans 90% des cas, il ne reçoit qu’une suite de mots sur laquelle il va caler SA propre émotion, intonation.
- la mauvaise utilisation des smileys : ils peuvent être utiles pour souligner l’émotion et l’intonation d’un message écrit mais gare aux signaux contradictoires. Un smiley qui sourit ne pourra jamais adoucir un message écrit en majuscule ou sans ponctuation. Et des smileys contradictoires perturbent aussi la lecture de votre message.
Je pourrais encore en trouver pleins d’autres je pense ! Mais il me semble que ce sont les erreurs les plus fréquentes, en tout cas, celles que je vois le plus souvent. J’ajouterais quand même qu’une grande partie de l’incompréhension sur les messages écrits viennent aussi de mauvaises pratiques :
ne pas lire le post, l’article, le message sur lequel vous réagissez : poser des questions alors que la réponse est déjà écrite , critiquer quelque chose qui n’a pas de lien, donner un avis non sollicité, déformer des propos lus trop vites…
Les bonnes pratiques de communication sur les réseaux
- ne pas se précipiter à répondre par écrit : relisez, attendez la fin des stories, de l’article, bref attendez de voir si votre message est nécessaire, justifié, utile…
- se mettre à la place de l’interlocuteur : je fais souvent l’expérience de lire un message que je trouve agressif avec un ton hyper joyeux pour voir si c’est le passage à l’écrit qui lui donne son côté agressif. Dans l’autre sens, vous pouvez y mettre un ton plus agressif ou plus sec pour vérifier si vos propos ne risquent pas d’être transformés. On garde toujours en tête que le destinataire ne connaît pas votre voix et votre intonation. Il peut vite transformer de l’humour en agression !
- on essaye d’écrire « correctement » : on pense à ajouter la politesse et la ponctuation. On y va mollo sur les !!! et ????, sauf si on veut justement appuyer sur cette intonation. Arrêtez de vous prendre la tête avec les fautes d’orthographes, il est plus utile d’ajouter un « bonjour » et « merci » pour éviter qu’un message ne se transforme en critique virulente.
- on choisit avec soin ses mots et leurs organisations : la langue française est riche de mots donc n’hésitez pas à chercher celui qui représente le plus justement votre pensée. Ce n’est pas pareil de dire à quelqu’un qu’il est radical ou directif, et de lui dire qu’il est entier !
- on y va doucement sur les smileys ! A ne jamais utiliser dans la volonté d’adoucir un message critique, souvent avec le smiley « clin d’oeil ». Cela n’ajoute que de la moquerie ou un ton un peu hautain. Conservez uniquement ceux qui soulignent l’humour par exemple, les blagues sont difficiles à faire passer à l’écrit.
- dernier conseil….passez par l’oral dans les cas les plus compliqués ! Vous avez vraiment quelque chose de « négatif » à partager, une incompréhension, une nuance à apporter ? Faites un message vocal quand c’est possible ! Ca évitera bien des malentendus !
Et surtout….
En dehors des bonnes pratiques de l’écrit, il y a une spécificité des réseaux : les réactions à chaud, l’agressivité/barrière et le besoin de donner son avis. Les réseaux sociaux sont un endroit merveilleux pour partager et échanger, mais malheureusement, c’est aussi un lieu de négativité permanente. Et s’il y a des gens violents, agressifs ou haineux, il y a aussi quantité de personnes qui deviennent « l’agresseur » sans le vouloir et sans mauvaise intention.
Pourquoi ? Parce que les réseaux sociaux nous offrent beaucoup (beaucoup) de contenus, de vies différents, de jolies choses mises en scène, de messages résumés par manque de place, de comparaison et de culpabilité. A titre personnellement, je reçois souvent des messages que je mets longtemps à digérer et je ne pense pas du tout que la personne à l’origine soit forcément « haineuse » à la base. Mais c’est une réaction humaine face à la jalousie, la vexation et la dissonance cognitive : si je me sens attaquée…j’attaque pour me défendre.
Si je prends évidemment ma responsabilité dans le fait que je m’expose, il est important aussi de comprendre le fonctionnement d’un réseau : suivre ceux que vous voulez suivre et le contenu que vous voulez recevoir. Personne n’a comme mission d’aller dire à l’autre que sa manière de penser est fausse ou que son comportement est mauvais. Et si un message résonne en vous, il est important de se demander d’abord pourquoi et si l’autre est responsable de ce ressenti en vous. A titre perso, j’ai aussi envie de répondre à certaines personnes de manière plus agressive parfois, parce que le message me touche, que je le trouve erroné, incomplet ou autre. Mais 1/ ce n’est pas mon job d’aller donner mon avis chez les autres et 2/ si je ressens ça, c’est ma responsabilité, pas la sienne.
On me dit parfois que je fais culpabiliser, que je suis trop radicale, pas assez nuancée (là j’avoue ça touche mon égo, c’est un peu ma mission de vie la « nuance »!)…et à force j’ai appris à me protéger en me rappelant qu’il s’agit des réactions personnelles en fonction du vécu des autres. Il y a bien sûr des critiques « constructives » (ça sera le prochain article tiens, qu’est-ce qu’une critique constructive?) et des messages où j’apprends, je comprends, je vois mes erreurs, etc. Mais sincèrement, 90%, c’est seulement des personnes blessées à titre personnel qui préfèrent me rejeter dessus leurs dissonances que d’y réfléchir. Et là encore, c’est normal, ça m’arrive aussi. C’est dur parfois de voir un message qui vous renvoie à une contradiction, à une faiblesse ou à une ignorance.
Mais si je pouvais résumer la « bonne communication sur les réseaux », ça serait que personne, peu importe son influence, n’est pas là pour vous faire sentir mieux, vous faire passer les nerfs, la tristesse ou la culpabilité. Passez votre chemin, protégez-vous, prenez le temps d’être prêt à recevoir le message en question, faites des pauses off et n’oubliez pas que derrière chaque compte, il n’y a qu’un humain, qui n’est ni votre psy, ni votre ami, ni un moteur de recherche 😀
Alors, ça vous arrive de ne pas arriver à passer un message par écrit ?

Coucou, merci pour cet article. Je ne suis pas du tout douée pour m’exprimer par écrit, du coup je m’abstiens souvent même pour dire du positif. Ton article m’aidera sûrement à mieux formuler mes idées, sur les réseaux ou ailleurs.
Bonne journée
Merci pour cet article ! Je me rends compte que durant le confinement, j’ai beaucoup utilisé les réseaux sociaux pour compenser le manque de vraies interactions. Mais, en fin de compte, je m’aperçois qu’ils ne permettent qu’une expression très limitée, ce qui peut paraître paradoxal étant donné le nombre de fonctionnalités qu’ils présentent. Souvent, la communication sur les réseaux sociaux me laisse très frustrée, même avec mes proches, car elle exige de construire des propos très courts, des résumés d’idées, ce qui est souvent très compliqué quand il s’agit de sujets aussi complexes que la politique, l’écologie ou le féminisme (mes thèmes de prédilection ^^). Du coup, en cette fin de confinement, je me suis surprise à ouvrir un vieux cahier et, quand un statut ou une story m’interpelle, j’ai pris l’habitude d’en discuter à l’écrit avec moi-même. Au moins, ça me permet de mettre en ordre mes opinions sans embêter personne. Les « vraies discussions » que je pourrai avoir à l’avenir n’en seront que plus saines à mon sens. Bonne journée !
Bonjour,
Je trouve votre article très intéressant. Je suis venue par le biais d’avril sur un fil. Je suis enseignante en bac pro où je dois faire de la communication avec mes élèves et justement, tout un travail avec les réseaux sociaux… Je pense que cet article fera partie de mes compléments de cours, si vous m’autorisez bien sûr à le partager à mes élèves. Je pense que cela pourrait être une géniale entrée en matière dans le cadre d’une classe inversée.
Merci de votre réponse et à bientôt.
Nine
oui bien sûr, c’est une chouette idée ! Il y a tant à dire sur la communication sur les réseaux ! Je suis ravie si cela fait partie de l’enseignement aussi !
Bon article sur le sujet !